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Interview avec Franck Vestiel - Juin 2008

Franck Vestiel - Juin 2008

Alors que "EDEN LOG" s'apprête à sortir en DVD le 8 Juillet prochain, Franck Vestiel a pris de son temps pour une interview dans laquelle il revient sur sa carrière, la sortie d'"EDEN LOG" ou encore le festival DeauvilleAsia où il faisait parti du jury...
Entretien avec un réalisateur à suivre :
Oh My Gore ! : "Bonjour Franck, pourrais-tu te présenter aux lecteurs d'Oh My Gore ! qui ne te connaissent pas encore ?"

Franck Vestiel. Réalisateur-scénariste d'"EDEN LOG".

Oh My Gore ! : "Avant de revenir à "EDEN LOG", pourrais-tu nous en dire un peu plus sur toi ? Pourquoi, quand et comment ta carrière s'est-elle orientée vers le cinéma ?"

J'ai grandi entre la Bible et Homère, les comics et les jeux de rôle pour schématiser. D'un milieu ouvrier, j'imaginais le cinéma comme la détente d'une semaine d'un boulot obligé. Avec l'arrivée de la vidéo grand public, je me voyais bien faire mes p'tits films perso le dimanche. J'ai commencé par la pâte à modeler et le dessin animé maison. J'ai eu l'opportunité tardive d'être assistant d'un réalisateur pour qui j'avais fait un storyboard (Comme une Bête - P Schulmann), j'ai enchaîné les films en prenant chacun comme le dernier. Et finalement j'y suis encore.

Oh My Gore ! : "Revenons un peu sur ton début de carrière. Tu as pas mal bossé en tant que premier assistant, et ce, sur beaucoup film français "de genre" comme "NID DE GUEPES", "BLUEBERRY", "SAINT ANGE", "ILS" ou même récemment le "DANTE 01" de Marc Caro, peux-tu nous en parler ?"

J'ai tout appris des autres. En accompagnant la concrétisation des envies de ces réalisateurs, j'ai réalisé qu'il y avait toujours deux films, celui que l'on rêve de faire, le meilleur du monde bien sûr, et celui qu'on finit par arriver à faire. D'autant que ce type de film n'est généralement pas étouffé par l'excès d'argent, surtout au regard de ses ambitions visuelles. Celui qui n'a jamais participé au processus de la fabrication d'un film serait surpris de savoir à quoi tient parfois l'existence d'un plan. J'ai rêvé d'un plan sur mon film que je n'ai pas pu faire à cause de la chaleur supportée par les figurants en costume, et bien sans rentrer dans les détails, ce plan manque au film de façon cruelle. J'ai en tout cas eu la chance de travailler avec des réalisateurs passionnés, partageurs de leurs envies. Le terrain a sculpté mes fantasmes, les a rendus plus réalisables.

Oh My Gore ! : "Après t'être fait la main sur quelques épisodes de "CENTRAL NUIT", tu diriges Clovis Cornillac dans "EDEN LOG". Peut-tu nous parler un peu de la genèse du film, que tu as également écrit ?"

Dirigé ... Disons que j'ai crée certaines conditions et que j'ai proposé à Clovis d'évoluer à l'intérieur.
J'avais envie de décrire un processus d'écriture, partir d'un point zéro. Une sorte de road-movie vertical, une remontée dans le temps parallèlement à celle d'un personnage vers la surface. Le tout baignant dans un univers à la Métal Hurlant qui a profondément éduqué ma culture SF.

Oh My Gore ! : "Comment es-tu rentré en contact avec Clovis Cornillac et comment as-tu trouvé sa prestation ?"

Nous nous sommes rencontrés sur le tournage d'une série. C'est lui qui est venu vers moi. À cette époque, je n'aurais jamais osé. Il m'a relancé régulièrement, il était persuadé qu'on avait quelque chose à faire ensemble. Quant à prestation, je n'ai évidemment aucun recul là-dessus. Je te laisse juge. Tout ce que je peux dire, c'est que son attitude sur le plateau, son professionnalisme, son implication ont été plus que nécessaire sur un tournage aussi dense. Tu vas avoir beaucoup de mal à trouver un réalisateur pour me contredire.

Oh My Gore ! : "Quel effet cela t'as fait de voir Clovis Cornillac incarner Asterix si peu de temps après "EDEN LOG" ?"

Il l'a incarné avant. Le calendrier de post-production en a inversé la sortie. J'ai vu Astérix après la sortie du mien je crois. Il est comédien, polymorphe comme peu, il fait son métier.

Oh My Gore ! : "Des anecdotes de tournage à nous raconter ?"

Rien qui ne me vienne spontanément. J'ai plutôt souvenir de l'ambiance, noire et humide. De la patience qu'on perdait tous rapidement, moi le premier. C'est dans ces moments qu'on réalise qu'on est bel et bien des animaux diurnes.

Oh My Gore ! : "Je suppose que les 66 copies t'ont un peu déçu ?"

Bien sûr, d'autant que j'ai appris en suivant de près la sortie qu'il y a le nombre de copies et l'endroit où ces copies sont placées. Qu'on ne soit pas à Marseille, Lyon, Toulouse, Brest et j'en passe mais plutôt dans des villes pas forcément reconnues comme ouverte à ce cinéma m'a évidemment attristé. Maintenant, nous avons tous assez de métier pour savoir que nous n'avions pas fait un film très grand public non plus.

Oh My Gore ! : "Selon toi qu'est-ce qui n'a pas séduit les exploitants lors de la sortie en salles le 26 décembre dernier ?"

Ce qu'ils ont estimé du potentiel commercial du film. Tout ça se décide loin de moi. C'est une partie du cinéma que je connais mal.

Oh My Gore ! : "Et au niveau des entrées, le film a-t-il quand même atteint ses objectifs ?"

Non. L'équilibre s'est fait avec la vente à l'étranger.

Oh My Gore ! : ""EDEN LOG" a pourtant été vendu dans des pays étrangers ?"

Oui. Ça a été inversement proportionnel à la sortie France. Le film voyage maintenant à travers les festivals. Il bénéficie sûrement ailleurs du côté un peu exotique.

Oh My Gore ! : "Quand on regarde le film, on se dit quand même qu'on assiste à une oeuvre très personnelle, tu penses que son semi-échec vient de là ?"

Je ne sais pas ce que veut dire une œuvre très personnelle. Je crois que "TERMINATOR" sont des œuvres tout aussi personnelles que celle de Cassavetes. Les camarades qui ont accepté des commandes, Kounen en tête sur "99 FRS", n'ont pas moins investi ce qu'ils sont pour autant. Pour avoir travaillé avec de jeunes réalisateurs comme assistant, j'ai le sentiment qu'on n'est jamais plus libre que sur un premier film, autant être radical. J'avais bien l'intention d'en profiter.

Oh My Gore ! : "Si quelque chose était à refaire dans ce projet, qu'aurais-tu changé ?"

On ne refait pas un projet, c'est tout l'intérêt. Ça marque un instant, si j'avais pu changer quelque chose, je serais sûrement encore entrain de tourner.

Oh My Gore ! : "Le film est projeté au BIFFF tout comme d'autres films de genre français "A L'INTERIEUR", "FRONTIERES" deux autres films qui malgré une bonne couverture médiatique ont souffert de leur distribution. Comment ressens-tu ce système qui limite les sorties d'un certain style de cinéma dans notre pays ?"

Il y a celui des camarades Palud-Moreau aussi. Le système est en adéquation avec le désir des gens. On peut à la rigueur lui reprocher de ne pas prendre de risques mais quand tu compares les chiffres de "L'ORPHELINAT" en Espagne et en France, tu te dis simplement que le public français n'est pas le plus ouvert à ce type de cinéma.

Oh My Gore ! : "Travailles-tu sur un nouveau projet ?"

Bien sûr. Pas encore démoulé ... Va falloir être armé pour me décourager.

Oh My Gore ! : "Que penses-tu du cinéma de genre français ?"

Je rattrape seulement maintenant une partie des sorties de l'année dernière, pour cause de tournage.

Oh My Gore ! : "Quand on voit les sorties de ces dernières années (Xavier Gens, Palud et Moreau, Alexandre Aja, Maury & Bustillo, et bien sur toi), peut-on dire qu'il y a une "french-touch" dans le cinéma de genre ?"

Des quelques filmos auxquelles tu fais allusion, je ne vois aucun point commun à part la langue. N'y vois bien sûr aucun mépris. Mais je ne cherche absolument pas à participer à un courant " français ". Et si le genre a construit en grande partie ma fascination pour le cinéma., je ne me sens porteur d'aucune revendication. D'un point de vue étranger, c'est vrai aussi que le cinéma français bénéficie d'un label un peu à part, de la même manière que la cuisine. Quelque chose qui ressemble parfois au respect dû aux personnes âgées. Une chose est sûre, si ce n'est pas toujours évident de " monter " un film en France, c'est très, très dur ailleurs.

Oh My Gore ! : "Parlons un peu du Festival Asiatique de Deauville maintenant puisque tu étais dans le jury Action Asia, c'est la première fois que tu venais?"

Absolument. Entre les membres du Jury, ceux de l'organisation et le fait de voir 3 films par jour, je me suis régalé.

Oh My Gore ! : "Ce n'est pas trop difficile d'être jury et de juger tel ou tel film ?"

Non, il faut relativiser quand même. Je suis très détendu vis-à-vis des prix, je ne souviens pas d'un prix qui m'a poussé dans une salle. Maintenant si ça permet de donner un coup de projecteur à l'un d'entre eux, ça n'enterre pas non plus les autres. Le résultat ne dépend pas de nous mais de la sélection du Jury par l'organisation du festival. En choisissant Kounen comme président et Marc Caro, l'organisation savait exactement comment allait s'orienter le palmarès.

Oh My Gore ! : "Nous avons été un peu surpris par le choix du jury avec "HEROS DE GUERRE", qui après tout n'est pas vraiment un film d'action, pourquoi ce choix ? Nous aurions bien vu le dernier Miike "CROWS ZERO" à la place..."

Paradoxalement le film est assez courageux, un homme s'en va faire reconnaître la mémoire de ses hommes contre une hiérarchie. C'est évidemment très convenu ici, voir même tiède mais faire un film comme ça en Chine est une forme d'insolence. Sur la forme et la construction, c'était incontestablement le plus abouti ... Maintenant tu sais ce que pense Dirty Harry des avis de chacun ...

Oh My Gore ! : "Quelle est ton opinion à propos du cinéma français ?"

Dans sa globalité, je ne m'y reconnais pas du tout. Il est nombriliste, informe. Je ne parle pas des gros films de comédies, qui ont toujours existées, je parle du film moyen, de toute cette tranche Télé7Jours, dont on confond les titres, dont on ne sait plus très bien si on les a vus ou pas. Bientôt on ne se souviendra même pas de les avoir fait. Le cinéma a toujours été un sport bourgeois, mais là on est " petit bourgeois ", je crois qu'il ne restera rien de toute cette sur-production, Le film de crise-de-trentenaire-parisien ne m'intéresse pas. Pas plus que j'ai attendu le cinéma pour savoir qu'il y a des gens " biens " en banlieue ou que les homos peuvent s'aimer d'un amour sincère. Ça ne me parle pas du tout l'étalage de déculpabilité d'un petit milieu de privilégiés. Maintenant entre "BABYLON AD", "MARTYRS" et le prochain Noé, va savoir, on n'est pas à l'abri d'avoir une année un peu plus excitante ...

Oh My Gore ! : "D'une manière générale, quels sont tes films d'horreur favoris? Et ceux qui t'ont le plus effrayés ?"

J'ai un souvenir très précis de trois films, pas forcément mes préférés mais ceux que je 'redoutais' le plus de par ce qu'on avait entendu d'eux. "L'EXORCISTE" et "ZOMBIES" en VHS, "ALIEN" dans un cinéclub. Même le logo du studio précédant le film m'inquiétait déjà tellement j'étais conditionné. Comme un rendez-vous attendu depuis longtemps. Avec le DVD, les gamins d'aujourd'hui ne soupçonnent même plus comme c'était parfois très dur de voir un film dans les années 80, on parlait de certains très longtemps sans les voir. En les regardant, je me suis d'ailleurs aperçu que beaucoup de mes camarades mythomanes n'avaient pas vus les films qu'ils prétendaient connaître ...

Oh My Gore ! : "Avec quel acteur aurais-tu aimé ou aimerais-tu tourner ?"

Bonne question ... Qu'il vaut mieux laisser sous cette forme. Je t'en cite un qui ne me coûte pas grand chose vu qu'il a décidé de raccrocher : Matthieu Kassovitz.

Oh My Gore ! : "As-tu déjà entendu parlé d'Oh My Gore et si oui, qu'en penses-tu ?"

Bien sûr que je regarde. Le genre reste marginal, c'est important d'avoir des relais. Je dois une énorme partie de ma modeste culture à Starfix par exemple. Je ne me souviens plus de ce qu'ils aimaient ou pas, je me souviens surtout des films qu'ils m'ont fait découvrir. Avant eux, je ne savais même pas qu'il y avait un cinéma asiatique à part Kurosawa. Ça m'a parfois appris à avoir un regard différent. J'aime plus la presse (internet compris) dénicheuse que celle du calambour assassin.

Oh My Gore ! : "Merci énormément pour cette interview !, je te laisse le mot de la fin."

La fin ? J'espère bien que non...
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Rodolphe BONNET - 17/07/2008 à 17:23
# 2

Je n'ai pas vu Eden Log, pas de copie dans ma cambrousse, de là à dire que Franck Vestiel est défaitiste, voir antipathique... Imagine, tu passes plusieurs années à monter un projet et constiuter une équipe, un tournage de fou, pour qu'au final ton film est sacrifié par une sortie minimaliste... Y a pas de quoi sauter au plafond non plus... Je suis assez d'accord avec lui sur sa façon de voir le Cinéma français... De grosses comédies sans gout produites par des chaines de télé pour leur futur prime time (maintenant que France 2 pourra plus diffuser de pubs, peut être qu'ils produiront moins mouauauau), et bientot les plus gros producteurs de films seront les opérateurs de téléphonie mobile... La classe.

A C - 19/06/2008 à 16:54
# 1

J'ai adoré Eden Log, l'interview est bien mais le mec a l'air défaitiste et antipathique...

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