par SUSPIRIA » 11 Mars 2010, 22:01
5 ans après "Le Pacte des Loups", Christophe Gans décide de s'attaquer à l'adaptation célèbre d'un jeu vidéo réputé réellement flippant : Silent Hill. Je ne vous évoquerai pas mon impression sur la qualité du jeu et son côté réputé effrayant car n'ayant jamais eu la curiosité d'y jouer je préfère donc vous faire part de mon implication émotionnelle sur le travail de notre réalisateur français passionné par le cinéma de genre en particulier.
Dès la séquence d'introduction on est frappé par la beauté des images : une petite fille transie, apeurée au bord d'un précipice où se déverse une immense cascade d'eau sauvage dans un trou noir béant sans fin ! la scène filmée sous divers angles pour mieux contempler ce décor grandiose est visuellement impressionnante et complètement fascinante. Le reste du métrage techniquement et esthétiquement parlant sera du même accabit ! Dès l'entrée dans le monde de Silent Hill aperçu sous un épais brouillard et une frêle pluie de cendre on est irrémédiablement attiré par l'ambiance inédite qui se diffuse insinueusement devant nos yeux, aidée par une musique étrange, douce et lancinante qui nous envoute l'ouie avec une belle harmonie ! l'effet d'immersion est accompli et immédiat ! l'ambiance continuellement bizarre et singulière nous pénètre dans un monde opaque langoureux vu nulle part ailleurs.
Une mère perdue dans ce "no man's land" iréel et hallucinogène accompagnée d'une femme flic partent à la recherche de sa fille furtivement disparue pour découvrir peu à peu l'horrible vérité dans cette étrange village fantome étouffé par un abominable secret.
Par petites touches successives nos héroines décontenancées et désorientées vont faire la connaissance avec d'étranges personnages tout droit sortis d'un enfer indéfini ! Des monstres de cauchemar, des créatures infernales repoussantes, nauséeuses et malsaines comme ces infirmières sans visages se contortionnant leur corps meurtri et désarticulé, des milliers de gros scarabées noirs mutants à petite tête d'épingle, un homme cadavérique enlacé de barbelés à la posture décharnée comme celui d'un arachnide difforme, un spectre sans visage et sans membres se déplaçant difficilement debout à la manière d'une limace et surtout l'homme à la tête de pyramide (Pyramid Head) armé d'une gigantesque épée en dents de scie couleur rouille. Une figure d'effroie charismatique et emblématique dans la représentation de cet ange pictural de la mort impitoyable capable de déchirer en un seul coup de main l'enveloppe de chair tendre d'un être humain. Il est fort dommage que ces 2 apparitions très spectaculaires et foisonnantes soient si brèves et pas assez exploitées !
La narration de Silent Hill est aussi un atout de qualité car la trame scénaristique cruelle et brute nous parle d'enfant martyrisé, violé et brûlé vif à travers un flash-back esthétiquement très soigné, éprouvant, à la manière de "sisters" de De Palma pour son côté documentaire poussiéreux, dérangeant et malsain.
Des tortures infligées par une armada de fanatiques ancestraux commanditée par une matriarche présomptueuse et démoniaque. Mais la vengeance d'Alessa, la petite fille maudite sera terrible et atteindra son apogée dans un final élogieux et gothique de chair et de sang qui pourra rappeler aux inconditionnels l'univers masochiste et bariolé d'"Hellraiser" à grands coups élancés de tiges écornées, des barbelés endiablés déchirant et déchiquetant les chairs humaines de pantins terrifiés, impuissants devant l'apparition de ces filets organiques, telle une pieuvre haineuse et enragée déployant ses chaines de mort spécialistes de la douleur rèche et rebelle ! Un peu dommage malgré tout que quelques FX en CGI perdent un peu de leur saveur et de leur impact viscéral.
La fin ambigue nous laisse en suspens et nous offre la possibilité de nous faire notre propre opinion, à moins qu'un second volet serait envisagé un jour prochain.
"Silent Hill" est un film d'horreur à l'ancienne qui mise tout ou presque sur son ambiance particulière et envoutante aidé par un scénario inquiétant et tortueux qui fait appel aux tourments de l'apocalypse dans un monde parallèle plutôt bien défini et retranscrit. Esthétiquement superbe et impeccablement campé par la séduisante et naturelle Radha Mitchell en mère courageuse et apeurée fermement décidée à retrouver sa fille, "Silent Hill" pourra peut-etre décevoir les amateurs du jeu d'origine par son manque de terreur car l'effet de flippe n'était apparement pas le but recherché par Christophe Gans trop concentré à créer une véritable ambiance inédite et un climat pénétrant.
Les interventions du père interprété par le pourtant excellent Sean Bean ne s'imposaient pas vraiment car il n'apporte rien ou si peu au déroulement de l'intrigue.
Malgré ces quelques bémols "Silent Hill" est un fascinant voyage au coeur des ténèbres particulièrement sincère et inspiré qui ennivre et fascine avec douceur et violence.