par Maniak » 15 Juin 2007, 19:05
A lintérieur
Genre: Horreur
Pays: France
Année: 2007
Réalisateurs : Alexandre Bustillo & Julien Maury
Avec : Alysson Paradis, Béatrice Dalle, Nicolas Duvauchelle
Le cinéma de genre français a toujours été beaucoup moins vivace que ses congénères américains ou italiens, pour ne citer queux. Est-ce la faute à des producteurs trop frileux ou a un réel manque de talents dans notre pays ? Pas facile de trancher, mais force est davouer que le cinéma dhorreur est très peu présent en France.
Aussi mise en route dun projet de survival horreur tel que A lintérieur fait toujours beaucoup parler delle. Dautant plus quand ledit projet est luvre de Alexandre Bustillo, amoureux du genre et connu pour avoir participé à la célèbre revue Mad Movies. Un jeune réalisateur passionné et sincère, et apparemment bien décidé à faire bouger les choses pour offrir à la France un vrai film dhorreur gore et ultra-violent, et pourquoi pas annonciateur dune future vague de films dhorreurs français
Seulement voilà, ce renouveau du film dhorreur français avait déjà été annoncé après un Maléfique très sympathique, un Haute Tension qui fait débat, et un Calvaire plus belge que français malgré ses acteurs
et on lattend toujours. Que lon aime ou pas ces films, force est de constater quaucun na eu limpact quont pu avoir Zombie ou Lexorciste en leur temps
Et ce nest pas A lintérieur qui changera la donne.
Et pourtant, on constate quand même quelques évolutions. Tout dabord la promotion du film sest faite de manière exceptionnellement large pour un film dhorreur. Affiches dans le métro et les arrêts de bus, bandes annonces sur internet et dans les cinémas, passage à cannes et interview des actrices sur les plateaux télés
Quand on sait que Haute Tension était sorti dans le quasi-anonymat quatre ans plus tôt, on voit quand même là une certaine évolution. Cela dit ne crions pas victoire trop tôt, le nombres de salles dans lesquelles passe le film nexcède pas la centaine sur toute la métropole.
Autre évolution ensuite : le gore. Disons le tout net, jamais film français na été aussi sanglant. Haute Tension est un film pour midinettes frileuses à coté
A lintérieur accumule éventrations, énucléations, décapitations et pleins dautres mots douloureux qui finissent par tion
Comme quoi, même en France on peut faire des films qui éclaboussent.
A ce titre on peut éventuellement parler de A lintérieur comme un film français révolutionnaire. Mais à ce titre uniquement, parce que hélas le reste savère plutôt décevant.
En effet on a limpression que le tandem de réalisateurs, à force de ne penser quà montrer du gore pour secouer les choses, en oublie lessentiel : faire peur !
Dommage, vraiment très dommage parce que le film commençais pourtant dune manière diablement excitante. En plus de bénéficier de nombreux aspects vraiment réussis.
Le début est des plus sympathique malgré quelques sporadiques défauts : Lambiance sinstalle calmement, et très vite le spectateur ressentira la même solitude et la même mélancolie que lhéroïne. Et il sy attachera tout doucement. A ce titre lactrice principale est plutôt douée et nous livre un portrait très réaliste de Sarah.
Soucieux dinscrire leur film dans un contexte social particulier, les deux réalisateurs feront échos aux émeutes qui secouent la capitale. Cela renforce le réalisme de lhistoire dune part, et dautre part, impose la maison de Sarah comme un lieu de sécurité par rapport au monde extérieur, à linstar du ventre dune mère pour son enfant.
Finalement on ne regrettera dans cette scène dexposition que lusage prématuré, et inutile dailleurs, dun plan de lintérieur du ventre, où on voit un ftus en CGI au rendu très artificiel et laid. Je ne comprends toujours pas pourquoi les deux réalisateurs ont eu tant de fois recourt à ce plan tout au long du film. En effet son inutilité pour lintrigue na dégale que sa laideur
Mais continuons sur les points positifs. Larrivée de Béatrice Dalle, inquiétante, mystérieuse, glaciale et terrifiante, est vraiment excellente. Le personnage, dont on ne sait rien, nest au début quune silhouette obscure. Limagination de spectateur fonctionne ici à merveille.
Lactrice (qui sest auparavant illustré dans un Trouble Every Day branchouillard, mais bien gore, et qui est quand même une des seules actrices en France à pouvoir briller dans ce type de rôles de psychopathes) est vraiment bluffante dans ce rôle. Féline et déterminée, imprévisible et ultra violente, elle risque fort de marquer les mémoires.
La toute première agression fait aussi clairement partie des bons points du film. Fort dune ambiance déjà tendue, le film atteint alors des sommets de brutalité. Le coup des ciseaux sur le nombril est vraiment terrible, et fera frémir de nombreux spectateurs.
Enfin, saluons le très bon travail effectué sur la photo et les teintes du film. Limage est toujours très sombre et oppressante. Cela installe une ambiance obscure du plus bel effet. Le métrage baigne également dans des couleurs chaudes, très charnelles. Et lidée de faire virer progressivement ses couleurs au rouge sang est excellente et fait échos à la montée de la violence.
Avec une telle première partie, on se demande vraiment comment les réalisateurs ont pu foirer leur coup
et pourtant
Sans doute est-ce la faute à un scénario bien trop étriqué. Une fois que laffrontement entre les deux femmes commence, clé de voûte de lhistoire, les réalisateurs semblent perdus et se répètent vainement durant toute la seconde partie du film. Le recourt répétitif à des intervenants extérieurs au duo finit par lasser et ne vient plus relancer le rythme de lintrigue, qui frôle alors dangereusement lennui.
Ensuite, lusage du gore à outrance, sil était encore impressionnant dans les premiers instants du film, finit par ennuyer aussi.. Pire que ça, à force den montrer toujours plus de manière systématique et artificielle le film tombe dans des grand-guignolades gores grotesques et ridicules dignes dun gros Z fumeux. A lintérieur saliène alors complètement le spectateur. Et en trempant sa caméra complaisante dans le sang, Bustillo et Maury ne font plus peur, mais provoquent un sentiment de lassitude bien légitime fasse à ce type de surenchère factice. On ne le répètera jamais assez, un film angoissant repose avant tout sur son ambiance et sa force de suggestion. Le gore ne doit être quun élément accessoire destiné à rendre tangible la menace, et pas la finalité du film comme cest le cas avec A lintérieur. Impardonnable quand le film a pour prétention de vouloir faire peur en adoptant un ton sérieux et réaliste.
Le film est beaucoup trop démonstratif, tant dans le gore que dans le scénario : la séquence obligée ou la méchante explique les tenants et les aboutissants de lhistoire réduit à néant toute lambiance de mystère qui faisait toute la force du début. Là encore, à vouloir en faire trop, les réalisateurs sabotent leur film. Aussi, le plan final, qui est dune étrange beauté à la fois repoussante et fascinante, perd totalement limpact quil aurait pu avoir si le film avait été mieux mené.
Bref, un film très décevant, dont les qualités réelles sont malheureusement détruites par lexcès de gore et le scénario mal construit du film. Et finalement il ne satisfera que les spectateurs peu exigeants et avides de barbaque sanguinolente outrancière