Dire que notre ami Romero n'avait plus retâté le terrain des zombies depuis
Day of the Dead, c'est-à-dire vingt ans tout ronds. Un tel come-back, ça se fête ! Et pourtant, le public n'a guère réellement suivi, ce qui fait au final de
Land of the Dead un échec commercial de plus au compteur pour le cinéaste. Une constatation d'autant plus frustrante lorsque l'on se rend compte que l'ensemble se veut d'un niveau au moins égal à l'honorable remake de
Zombie sorti quelque temps auparavant, le bourrin
L'Armée des Morts, dont la recette fut d'ailleurs nettement plus fructueuse. Romero se paie le luxe d'une production hollywoodienne et de comédiens pour la plupart assez réputés, signant un détonnant zombie movie dans lequel action, Gore et satire sociale se conjuguent avec une indubitable efficacité. Des qualités quasi essentielles à la tradition, qui n'éclipsent cependant pas le caractère basique et routinier de l'ensemble.
Il faut bien l'avouer, l'on ne retrouve quand même pas dans
Land of the Dead le climat apocalyptique et la portée politique qui faisaient la force de
Zombie et
Day of the Dead. Romero n'a certes point fini de régler ses comptes avec la société qui l'entoure; toutefois, il délaisse cette fois-ci trop souvent l'étude comportementale de ses protagonistes confrontant leurs différences idéologiques au profit d'une critique du capitalisme plutôt ostensible, mais somme toute linéaire, voire éculée en certains aspects (l'éternel épisode du milliardaire lâche, cupide et corrompu, laissant les habitants de sa ville à la merci des zombies, avec un trait tiré à outrance). Par ailleurs, un curieux manque de personnalité découle du film lui-même. L'on ne parvient à retrouver la véritable griffe de Romero qu'à de très rares instants, l'ensemble évoquant parfois à s'y méprendre un simple bon action/horror movie de commande des années 2000, dont on aurait pu attribuer la réalisation à Zack Snyder ou Michael Bay. Rendons-nous à l'évidence, le pittsburghois n'avait d'autre ambition que de réaliser un efficace produit de série B dans l'air du temps, en évitant de trop renouer avec le bon vieux temps, soit le syndrome de Cabrel. Et c'est tant mieux, après tout. Romero nous gratifie d'un spectacle Gore, visuellement chiadé et sans temps morts, tout de même doté de quelques séquences esthétiquement sublimes (les morts-vivants émergeant d'un lac) et d'excellents effets spéciaux mi-maison mi-numériques dus à l'association KNB. Le casting jouit des savoureuses prestations de John Leguizamo et Dennis Hopper, qui supplantent le jeu insipide de Simon Baker et Asia Argento, quant à la bande-son, elle s'écoute aussi bien sur le moment qu'elle s'oublie vite. L'une des rares surprises de
Land of the Dead réside dans son degré de Gore inattendu: morsures extrêmement sanguinolentes, explosions de têtes au shotgun, tripaille, arrachage d'épiderme de visage, décapitations et démembrements en tous genres, le tout forme une belle petite boucherie pas toujours très loin de celle de
Day of the Dead.
Dynamique, étonnamment sanglant et mis en scène avec une efficacité dévastatrice,
Land of the Dead n'en demeure pas moins un objet mineur et impersonnel dans la filmographie de son auteur. Romero bâcle un tantinet le fond au profit de la forme, ce qui ne l'empêche pas de nous prouver qu'il sait encore tenir une caméra. Un bon film, à défaut d'être une révolution dans le paysage actuel du genre.
7/10
Chouette petit guest-star du maître Savini !