par Sir Gore » 21 Juillet 2006, 22:00
Les années passent, et Salo ou les 120 journées de Sodome nest plus ce quil a pu être à lépoque où des cinéastes comme Gaspard Noe ou Claire Denis furent déstabilisés en le découvrant pour la première fois. En fait, cette ultime réalisation de Pasolini se plante sur toutes ces caractéristiques: premièrement, la peinture des riches sombrant dans la déchéance et la perversité sous le régime fasciste de la Seconde Guerre Mondiale échoue dans sa crédibilité, car une bonne part de leurs agissements tiennent de la pure bouffonnerie dénuée de sens; ou plutôt est-ce à ce moment-là une grosse caricature plus quune peinture, en réalité, notre question ne trouve pas sa réponse, et lon reste plus agacé que décontenancé; deuxièmement, les audaces de violence du film ayant autrefois fait fureur paraissent à lheure actuelle bien gentillettes à laune de ce quil sest fait par la suite; pour être plus franc, il savère préférable de sattarder sur un de ces bandes dexploitation des années quatre-vingt-dix - citons Camp 731 - qui ont au moins elles le mérite de combler réellement le spectateur en mal de sensations fortes malsaines de par leur voyeurisme sans aucune retenue ni même distance, à grand coup de sévices plus complaisants les uns que les autres et de Gore racoleur. Pas grand chose de tout cela dans Salo, même si certains passages au demeurant dérangeants font comprendre le scandale de lépoque, de la même manière quun Orange Mécanique.
De surcroît, le métrage se permet dennuyer les trois quarts du temps avec des temps morts parfois à nen plus finir, quaggrave un gros manque de rythme et un tempo des plus monotones; ainsi, on doit endurer les multiples récits de trois vieilles peaux tout juste dignes dalimenter le stock de gags cracras dun volet de Scary Movie entre deux élucubrations salaces et perverses ou non de quatre notables certes interprétés par de bons comédiens (lexcellent Paolo Bonacelli notamment), mais par conséquent sous-exploités.
Entre temps, un peu de caca, de cul, de pipi et quelques sévices atroces dans leur fond mais souvent rendus inoffensifs dans leur forme ne seront pas mis en scène de manière suffisamment convaincante pour nous faire réellement grincer des dents. La réalisation demeure néanmoins correcte, sobre sans non plus faire des merveilles, et le seul plan réellement magnifique du film se trouve au tout début, une fois le générique terminé, où la caméra part dune vue dun magnifique lac pour sarrêter vers un grand bâtiment, celui des notables fascistes. Le seul.
Au mieux, Salo ou les 120 journées de Sodome peut se voir interpréter telle une parodie qui ne va pas jusquau bout de son cynisme, au pire, il ne sagit plus que dune uvre déplaisante, datée et maladroite dans ses provocations davantage que choquante et nauséeuse, même insoutenable comme beaucoup lont dit, dont labsence de crédibilité dans le jeu des acteurs et lextrême lenteur du rythme se révèlent fort rébarbatifs. Pas même instructif, il laisse déçu et avec le sentiment amer de sêtre fait arnaquer dans les règles de lart. Reste une belle musique de générique ainsi que les audaces respectables du film si lon le restitue dans le contexte de son époque, mais cela ne représente pas beaucoup.
3/10