Le Japon est en crise: les adolescents se rebellent et refusent toute autorité de la part des adultes. Un programme de survie se met en marche; il consiste à isoler une classe entière sur une île déserte et d'en obliger les élèves à s'entretuer jusqu'au dernier... qui par ailleurs pourra rentrer chez lui sain et sauf. Le professeur Kitano dirige.
Passons outre le bien connu phénomène
Battle Royale,
l'Orange Mécanique japonais qui a fait fureur partout dans le monde, le brûlot ultra-violent comme on en avait jamais eu droit auparavant, le grand film dénonciateur d'une société nippone de plus en plus chaotique. Foutaises ! Cette dernière réalisation achevée de Kinji Fukasaku prend davantage des allures d'objet bis au sens véritable de l'appellation, comme à la belle époque des années quatre-vingts où le cinéma italien et turc se complaisait dans les photocopies fauchées de blockbusters US. Ici, il s'agit d'un ersatz de production hollywoodienne avec quelques millions de dollars en moins bien sûr, mâtiné d'un pseudo-discours sur les dérives sociales du japon et de quelques - timides - velléités d'ultraviolence façon manga. Rien de plus spécifique.
Le film dégouline de jeunes personnages tous plus caricaturaux les uns que les autres, en particulier l'interprète principal jouant le rôle de Shuya, cabotin et incrédible à souhait, avec une expression continuellement éberluée (le personnage de Kitano surnage de cette misère). Ce choix global d'acteurs arrive à être si contestable qu'il transforme déjà à lui seul
Battle Royale en un nanar vrai de vrai.
Et des caractéristiques de nanar, il n'en manque pas ici: situations invraisemblables en pagaille, raccords douteux, dialogues minables, narration en roue libre, grosses lacunes rythmiques et on en passe. Mais malgré tout, l'ensemble divertit aimablement, grâce à quelques scènes de bourinnage franchement décomplexées, où nos marmots s'entretuent à chaque fois ou presque de la manière la plus gratinée possible. Pas de quartier, l'hémoglobine coule, l'on ne meurt pas d'un seul coup; voilà quelque bon point que nos amis d'outre-atlantique n'auraient au grand jamais osé mettre en scène de manière aussi crue.
Parlons justement de la mise en scène; très académique, presque digne d'un téléfilm d'action de l'après-midi, avec un rendu photographique terne et quelconque, elle est loin de faire des étincelles. Encore une fois, il aurait fallu un traitement artistique plus conséquent pour parvenir à faire ressortir les idées principales du métrage (qui s'avèrent évidemment excellentes) en leur insufflant une véritable dimension.
Le dénouement, gros foutoir lourdingue et pas drôle, se révèle d'une platitude extrême, comme si la dernière petite montagne de crédibilité porteuse d'espoir s'effondrait d'un seul coup. Mais la musique du générique de fin est tout simplement... cool. Une petite song pop/rap rafraîchissante, sans prise de tête, à contrario du film.
Par excès de prétention et parce qu'il ne se veut pas à la hauteur de son redoutable schéma scénaristique en plusieurs aspects,
Battle Royale se dimensionne en une petite production de série B qui vaut pour ses instants de canardages jubilatoires et c'est plus ou moins tout. Le soufflé retombe très vite, mais le plaisir demeure. Aussi raté qu'efficace, allez savoir pourquoi.
6/10
