
Réalisation: Dario Argento
Scénario: Franco Ferrini, Gianni Ramoli, Dario Argento.
Casting: Asia Argento, Christopher Rydell, Piper Laurie, Frederic Forrest, Laura Johnson.
Production: Dario Argento
Musique: Pino Donaggio

David, dessinateur de presse, recueille Aura, une jeune anorexique qui semblait sur le point de se jeter dans les eaux du Mississipi. Rapidement récupérée par la police, elle est ramenée à ses parents, deux émigrés roumains. Sa mère, Adriana, est, par ailleurs, une médium réputée. Suite à une séance de spiritisme qui tourne mal, cette dernière s'enfuit dans les bois, où elle est rejointe par son mari. Aura les poursuit, mais elle arrive trop tard: ils sont assassinés sous ses yeux ! L'adolescente a juste le temps de voir le tueur brandir leurs deux têtes décapitées ! Aura rejoint alors David. Ils vont tenter de démêler cette mystérieuse affaire, apparemment liée à d'autres cas criminels...

Réalisé durant la période américaine de Dario Argento, Trauma se veut thématiquement parlant un retour aux sources pour le cinéaste, qui recouvre ici le schéma narratif de ses premiers gialli (L'Oiseau au Plumage de Cristal, Le Chat à neuf Queues, Les Frissons de l'Angoisse) tout en accordant une mise en valeur obsessionnelle à l'effigie de l'héroïne, comme il l'avait fait auparavant avec Jennifer Connelly dans Phenomena. Asia, la fille d'Argento, alors inconnue et tout juste âgée de dix-sept ans, prend donc les traits du personnage principal, celui d'une adolescente anorexique menant l'enquête avec un journaliste afin de découvrir l'identité du psychopathe qui a assassiné ses parents. L'auteur de Suspiria exécute - de manière quelque peu laborieuse, il faut bien l'avouer - le cheminement habituel des thrillers avec lesquels il fit ses preuves, mettant en exergue des éléments d'intrigue typiques tels que la mémoire visuelle, les effets symboliques et les gros revirements de situation finals. Le scénario peine à surprendre et à captiver, si bien qu'il évoque parfois celui d'un téléfilm policier bateau.

Il en va fort heureusement de tout autre concernant la réalisation de Trauma, d'une puissance esthétique pour le moins exceptionnelle; luxe du format cinémaScope, plans subjectifs bluffants non sans rappeler ceux du Halloween de John Carpenter, caméra en perpétuelle agitation, montage ciselé à la perfection... l'on en vient à oublier certains éclairages de mauvaise qualité (surexpositions, flous), qui contrastent curieusement avec la splendeur formelle de l'ensemble. Une mise en scène remarquable pour en conclure, qui confine souvent à l'esthétisant, mais ne s'aventure jamais dans les outrances plastiques d'un Suspiria ou d'un Inferno pour autant. Dario Argento a recruté Tom Savini, le grand maître des maquillages Gore outre-Atlantiques, afin de renforcer la violence graphique des scènes de meurtres du film. Le résultat, minimaliste mais convaincant, donne lieu à quelques jolis effets de décapitation, même si le coup des « têtes parlantes » tend à faire tourner la sauce au ridicule. Il faut par ailleurs souligner dans Trauma l'importance de la bande-son, signée Pino Donaggio; loin des symphonies psychédélico-synthétiques du groupe Goblin, le score se compose ici de musiques plus classiques, plus sobres, mais tout aussi belles. La direction d'acteurs ne se révèle guère le point fort de l'entreprise. Si Asia Argento dégage un charme incroyable, elle n'apparaît pas toujours très crédible dans son rôle de gamine à l'apparence perturbée, quant à Christopher Rydell, son jeu rappelle celui d'un comédien de série Z. Cela dit, en bon cinéaste de genre, Argento, tout comme bien d'autres de ses homologues, n'a jamais fait preuve d'un grand génie dans la façon de diriger les interprètes de ses réalisations, et à ce niveau-là, Trauma ne se déshonore pas plus que la moyenne des productions de sa catégorie et de son époque.

Mineur dans la carrière de Dario Argento, poussif dans son intrigue, mal rythmé et pas toujours maîtrisé, Trauma demeure pourtant l'une des plus éclatantes preuves du savoir-faire technique de son auteur, qui affirme ici une fois de plus ses grands talents d'esthète et sa confondante capacité à créer une atmosphère palpable. Les grandes heures du cinéaste semblaient déjà appartenir au passé en ces temps-là, avec cette réminiscence un peu vaine de la grande époque du giallo, mais le papa de Suspiria savait encore prodiguer sa virtuosité filmique et envoûter le spectateur comme personne.
6/10


