HYPNOSE
Titre d'Origine: Stir of echoes
Réalisateur: David Koepp.
Année: 1999.
Origine: U.S.A.
Durée: 1h40.
Distribution: Kevin Bacon, Kathryn Erbe, Ileana Douglas, Liza Weil, Kevin Dunn, Conor O'Farrell, Jennifer Morrison, Zachary Davod Cope, Lusia Strus.
GRAND PRIX AU FESTIVAL DU FILM FANTASTIQUE DE GERARDMER EN 2000
Sortie en salles en France le 3 Mai 2000. U.S: 10 Septembre 1999.
FILMOGRAPHIE: David Koepp est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 9 Juin 1963 Pewaukee (Wisconsin, Etats-Unis)
1994: Suspicious (court-métrage)
1996: Réactions en Chaine
1999: Hypnose
2003: Suspense (télé-film)
2004: Fenêtre Secrète
2008: Ghost Town
2012: Premium Rush.
Sorti à la même période que le 6è Sens, ghost story à l'ancienne concoctée par M. Night Shyamalan, Hypnose fut malencontreusement occulté à tort, faute de son sujet similaire (un enfant communiquant avec les morts épaulé par un adulte rationnel tentant de découvrir une vérité éclipsée) et du prodigieux succès planétaire porté sur les épaules du novice Haley Joel Osment mais aussi Bruce Willis. Inspiré d'une nouvelle du célèbre écrivain Richard Matheson, il serait temps aujourd'hui de reconsidérer l'oeuvre digne de David Koepp, couronnée à juste titre du Grand Prix du Festival de Gérardmer en 2000.
Tom Witzky mène une existence paisible à Chicago en compagnie de sa femme et son enfant. Au cours d'une soirée festive, il s'essaie sans conviction à tenter une séance d'hypnose improvisée par une amie railleuse. Depuis cette expérience, il est sujet à d'intenses visions hallucinatoires particulièrement imbitables et dérangeantes. Peu à peu, Tom va découvrir la vérité sur une affaire de disparition d'adolescente par l'entremise de ses visions fantomatiques.
Hypnose est le genre de film que l'on redécouvre quelques années plus tard dans un état d'esprit distinct après l'avoir malencontreusement comparé avec un succès planétaire au thème similaire. En l'occurence, nous sommes indéniablement frappés par la maîtrise de la mise en scène entamant d'entrée de jeu son canevas horrifique par une séance d'hypnose hermétique. Une épreuve psychologique sensorielle portée au témoin incrédule, Tom Witzky, subissant insinueusement un florilège d'images insolites consciencieusement structurées par une mise en forme baroque et inquiétante. Cette séquence percutante et concise frappe par son aura insolite, son caractère palpable et surtout elle rend l'expérience d'autant plus persuasive qu'elle est remarquablement exacerbée par l'interprétation habitée de Kevin Bacon. Un rôle à la mesure de son talent endossant avec une belle vigueur un père de famille sans histoires, équilibré et amoureux de sa dulcinée mais bientôt intrigué par le comportement de son bambin communiquant discrètement avec un personnage invisible et surtout de son expérience d'hypnose altérant sa propre réalité avec l'intrusion cinglante d'images d'avertissement imbitables. Le travail fourni sur la bande son occupe également une place considérable pour provoquer un sentiment d'anxiété chez le spectateur intrigué mais c'est surtout le suspense remarquablement établi autour d'une histoire d'enlèvement d'adolescente qui rend Hypnose continuellement passionnant, prégnant et captivant.
La subtilité suggestive allouée à son scénario remarquablement construit permet au spectateur de s'impliquer de manière attentive dans cette ghost story offusquant une famille au bord de la déliquescence. L'étude psychologique des personnages en prise avec leur conflit conjugal crédibilise naturellement leur rapport orageux par des situations jamais bêtifiantes ou conventionnelles. Une relation aussi communément compassionnelle même si la lente progression dans le folie du père de famille rendu inflexible et intransigeant ne fera qu'amplifier se sentiment de marasme incontrôlé.
Quand à sa conclusion à tiroirs, Hypnose se permet après son point d'orgue frénétique une dernière note émouvante dans sa poésie cathartique, suivie l'instant d'après d'un inquiétant moment ombrageux octroyé sur l'enfant installé à l'arrière d'un véhicule mené par ses parents en route vers une contrée indéterminée. Un garçonnet victimisé par l'emprise des morts, irrité par l'écho machinal de murmures spirituels invoqués de façon insolente.
Il faut impérativement saluer l'interprétation de l'excellent Kevin Bacon, parfait de sobriété dans son personnage assidu de paternel obsédé à l'idée de découvrir l'ultime vérité sur l'origine de ses visions irréelles compromises par un esprit surnaturel. On sera aussi fasciné par la trogne inquiétante de l'innocence de son bambin interprété par David Cope, surprenant de naturel diaphane dans ses expressions raisonnées pour un si jeune âge. Tandis que les charmantes Kathryn Erbe et Ileana Douglas composent avec aplomb des femmes affirmées et délibérées.
Superbement conté, interprété sans fioriture et méthodiquement construit dans un implacable suspense, Hypnose est le genre respectueux de film fantastique humble faisant honneur à la foi du spectateur. L'intelligence de sa réalisation menée avec dextérité car réfutant l'artillerie d'effets spectaculaires ou grand-guignolesques propose à contrario des séquences tantôt angoissantes (les séances d'hypnose, les flashs carmins imposés par le psyché troublé de Tom, la baby-sitter déconcertée de la conversation entendue à travers le moniteur de surveillance par l'enfant à Samantha) ou terrifiantes (l'avertissement funèbre du voisin de palier en guise de prémonition, le simulacre du rapt de Jake, le coup de folie suicidaire de l'adolescent, la découverte du cadavre décharné dans la cave, le viol subi par Samantha). Des séquences adroites mises en exergue sur la véracité d'un quotidien fustigé. On pense parfois au magnifique l'Enfant du Diable auquel il renvoie d'étranges similitudes dans sa narration appuyée sur l'empathie d'une mort innocente et d'un homme avide de cette abominable découverte. Un clin d'oeil implicite est également attribué au fabuleux Dead Zone de David Cronenberg sans toutefois tenter de plagier vulgairement son illustre maître !
Hormis un épilogue quelque peu prévisible mais haletant et fertile en péripéties perfides, Hypnose est l'un des plus réussis métrages des années 90 dans son genre spécifié.