FOG
Titre d'origine: The Fog
Réalisateur: John Carpenter
Année: 1980
Durée: 1h29
Distribution: Adrienne Barbeau, Jamie Lee Curtis, Janet Leigh, John Houseman, Tom Atkins, James Canning, Charles Cyphers, Nancy Kyes, Ty Mitchell, Hal Holbrook, John F. Goff.
Sortie salles France: 19 Mars 1980. U.S: 8 Février 1980
FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis).
1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 :The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible, 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward
"Tout ce que nous voyons ou croyons voir n'est-il qu'un rêve dans un rêve ?"
Edgar Allan Poe
Hormis son Prix de la critique à Avoriaz en 1980 et un succès commercial d'estime, Fog reçu un accueil mitigé de la part de la critique spécialisée. D'ailleurs, insatisfait du premier montage, Carpenter remania 1/3 du film (ajout et suppression de scènes) tout en modifiant la bande sonore ainsi que la partition musicale.
Antonio Bay, une petite ville côtière de Californie du Nord. Une légende prédit que des fantômes lépreux tapis dans l'ombre d'un brouillard ressurgissent des flots pour assassiner six citadins et tenter de récupérer leur cargaison. En effet, le village fut construit grâce à l'or pillé par le prêtre Malone et ses cinq complices lorsque Blake et son équipage voulait trouver refuge sur la rive. Attiré par la lumière d'un feu de camp, le navire s'écrasa sur un rocher et coula avec l'équipage. Cent ans plus tard, les victimes de ce traquenard décident de se venger. Une gérante de station de radio postée à l'intérieur d'un phare tente d'avertir la population qu'un étrange brouillard semble semer la terreur et la mort.
A l'image de son envoûtant préambule au cours duquel un vieux marin assis autour d'un feu de camp narre à une assemblée de gamins dociles une histoire terrifiante de spectres vengeurs, Fog est une légende séculaire élaborée avec civisme pour renouer avec l'ambiance puriste des ghosts-story d'antan. Oeuvre mineure dans la filmographie de Carpenter, sujette à de multiples modifications techniques et narratives en cours de montage, Fog est pourtant une illustration flamboyante de ce que la série B modeste peut agrémenter de plus épurée en terme d'atmosphère latente et crépusculaire. Avec un argument fascinant confiné autour du conte horrifique mais linéaire et sans véritable surprise, John Carpenter va transcender ses contraintes par l'utilisation originale d'un phénomène naturel diaphane, le brouillard ! Avec une belle efficacité dans la gestion de l'angoisse et du suspense renforcé par un rythme oppressant, cette histoire de fantôme vengeur utilise judicieusement son décor naturel marin isolé autour du village d'Antonio Bay. Avec une maîtrise indiscutable dans la gestion du cadre, de l'espace et la manière dont le brouillard s'accapare de l'environnement pour emprisonner ses proies, Fog fascine et nous entraîne dans un enivrant cauchemar.
Il fallait oser privilégier le rôle principal à une nappe diffuse pour véhiculer mystère anxiogène d'une menace surnaturelle auquel des morts-vivants s'y sont éclipsés. C'est cet élément naturel avili par le Mal, destiné à contaminer une petite bourgade bucolique qui nous fascine par son aura impénétrable. De surcroît, la manière habile dont Carpenter utilise l'apparence blafarde de nos spectres errants est souvent suggérée par des silhouettes tapies dans l'ombre ou dans la blêmitude vaporeuse pour mieux ébranler la victime à l'aide d'un crochet de boucher rubigineux.
Toute l'intrigue est focalisée sur le destin de deux couples de survivants, prochainement contraints à se réunir dans la chapelle d'un prêtre sous la recommandation d'une responsable de poste radiophonique afin de contrecarrer le brouillard meurtrier ! Et pour intensifier la situation alarmiste, le rejeton de cette dernière est réfugié dans la demeure de sa grand-mère, alors que Blake et ses complices ont décidé d'y perpétrer leur prochaine offensive. Emaillé de séquences horrifiques habilement suggérées par l'emprise démoniaque du brouillard surnaturel, Fog attise le frisson et l'effet de surprise dans les attaques cinglantes commises par nos lépreux putréfiés. Avec un accord musical envoûtant confectionné par le maître en personne, le film épouse un rythme haletant davantage oppressant pour scander son point d'orgue vers le huis-clos mystique d'une église vénale. Et pour effréner l'action, Carpenter inclus en parallèle une terrifiante séquence de réclusion quand notre animatrice radio, poursuivie par les revenants, est contrainte de se blottir sur le toit du phare !
Dominé par la présence de la charmante Adrienne Barbeau et épaulé d'une pléiade de seconds rôles attachants (Hal Holbrrok en prêtre renfrogné, Jamie Lee Curtis en routarde impudique, Janet Leigh en sexagénaire engoncée et Tom Atkins en séducteur paternel), Fog est un petit film d'angoisse sublimé par son ambiance fantasmagorique. L'esthétisme formel de son environnement naturel, sa photogénie immaculée et ses teintes flamboyantes, son concept aussi original que singulier ainsi que sa mise en scène géométrique, convergent à un classique irréductible du genre.