EMILIE, L'ENFANT DES TENEBRES
Titre Original: Il Medagione Insanguinato
Réalisateur: Massimo Dallamano.
Année: 1975.
Origine: Italie/Royaume-Uni.
Durée: 1h30.
Distribution: Richard Johnson, Joanna Cassidy, Ida Galli, Nicoletta Elmi, Edmund Purdom.
Sortie en salles en France le 21 mars 1979. Sortie U.S.A: Mars 1976.
FILMOGRAPHIE: Massimo Dallamano est un directeur de la photographie et un réalisateur italien né le 17 avril 1917, décédé le 4 Novembre 1976.
1968: Le tueur frappe trois fois.
1972: Mais qu'avez vous faits à Solange ?
1973: Piège pour un tueur
1974: La Lame Infernale
1975: Emilie, l'enfant des Ténèbres.
"..... Le Diable est à l'origine des premiers malheurs de l'humanité...... Il est l'ennemi secret qui a semé erreurs et calamités dans l'histoire de l'homme."
Sa sainteté. Le Pape Paul VI.
Illustre auteur des célèbres classiques du Giallo, Mais qu'avez vous faits à Solange et La Lame Infernale, Massimo Dallamano réalise en 1975 son dernier film testamentaire (il mourut quelques mois après la fin du tournage), Emilie, l'enfant des ténèbres. Surfant sur la vague de l'Exorciste sorti 2 ans au préalable, le film emprunte au thème sataniste de la possession maléfique en la personne d'une jeune fillette, traumatisée par la mort de sa mère, brûlée vive incidemment devant ses propres yeux.
Michael vient de perdre sa femme dans un tragique incendie de cause accidentelle alors que sa fille Emilie est durement éprouvée par cette perte maternelle. Pour mieux accepter son deuil, il décide de partir en Italie afin de réaliser un reportage sur les fresques picturales représentant le Diable. Irrémédiablement, il est attiré par un tableau étrange auquel une petite fille semble effrayée par l'apparence spectrale d'une dame vêtue de blanc. Quelques instants plus tard, Michael achète dans une antiquité un médaillon qu'il offre à Emilie. Depuis, la fillette semble changer de comportement pour devenir davantage irascible et agressive.
Avec cet ultime long-métrage, l'excellent réalisateur Massimo Dallamano délaisse le giallo pour s'aventurer dans le genre horrifique en pleine expansion dû au prodigieux succès de l'Exorciste concocté par William Friedkin et s'inspire à nouveau d'un cas de possession diabolique sur fond de réincarnation.
Entièrement dédié à son atmosphère étrange particulièrement prégnante, rehaussée par son climat champêtre de paysages transalpins ensoleillés et ces étroites villas inquiétantes, Emilie, l'enfant des Ténèbres joue à fond la carte de la suggestion pour nous narrer une intrigue linéaire à suspense irrésistiblement envoûtante.
Sans aucune surenchère de foutre les jetons en épatant la galerie par l'entremise d'effets-chocs spectaculaires ou racoleurs (exit l'Antéchrist sorti un an auparavant pour singer l'Exorciste), Massimo Dallamano préfère la sobriété et investit tout son potentiel dans la création d'une ambiance opaque languissante, avec comme principale source, une fresque gothique d'une beauté funèbre étrangement trouble et hermétique.
Nos héros vont donc être facilement décontenancés, fascinés par l'esthétisme macabre d'un tableau ancestral dessiné il y a plus de 200 ans par un peintre sans identité alors qu'une fille et sa mère sont mortes dans de mystérieuses circonstances. On imagine alors furtivement qu'Emilie pourrait être la réincarnation de la petite fille décédée et que l'histoire se répète à nouveau 2 siècles plus tard par l'alchimie diabolique du tableau et d'un médaillon maudit.
Toute la réussite inhérente du métrage est allouée par ce sentiment crédible, persuasif de vouloir captiver le spectateur par cet alliage d'éléments troublants, de paysages bucoliques lugubres, d'objets gothiques ancrés dans les époques vétustes à l'aura mystique transalpine.
Sur un rythme lent mais indéniablement prenant, nos protagonistes vont devoir faire face à une série d'incidents dramatiques troublants alors qu'Emilie semble davantage habitée par la présence d'une entité malfaisante. La présence supplémentaire d'une sinistre comtesse sexagénaire craintive très portée sur les phénomènes irrationnels va ajouter de surcroît ce sentiment lattent de mystère insondable.
Richard Johnson (l'inoubliable médecin de l'île maudite dans l'Enfer des Zombies) et Joanna Cassidy(qu'on ne présente plus), forment un duo d'amants désinvoltes quelque peu équivoque dans leur attitude condescendante face aux morts présagées qui enveniment le récit (ils semblent tous deux plutôt indolents à la mort de la gouvernante qui était amoureuse de Michael). Mais c'est surtout l'étrange Nicoletta Elmi au visage ombrageux d'une rousseur pastel (la Baie Sanglante, Chair pour Frankenstein, les Frissons de l'angoisse), endossant le personnage perfide d'Emilie qui exacerbe ce sentiment persistant d'insécurité face aux évènements paradoxales déployés avec soin consciencieux dans son climat d'angoisse sous-jacente.
Relativement passée inaperçue à l'époque de sa sortie et totalement ignorée de nos jours, la dernière ambition de Massimo Dallamano est pourtant un excellent film d'ambiance d'une saveur vintage bien ancrée dans son époque italienne des glorieuses années 70. Oublions la simplicité de son scénario linéaire privilégiant un suspense lattent accentué d'une lourde atmosphère de mystère diffus, et permettant en prime de déployer quelques images baroques d'une poésie limpide (Emilie, le teint blême, entièrement vêtue de blanc, interprétant un air de piano dans une pièce gothique jalonnée de tableaux).
Scandé par une superbe partition obsédante de Stelvio Cipriani dans sa douce mélodie élégiaque, Emilie, l'enfant des Ténèbres est une attrayante série B d'épouvante intelligemment conçue, humble et notable, parfois effrayante par le biais de certaines séquences concises insistant sur les zooms des expressions horrifiées de nos protagonistes, avant de nous émouvoir dans un magnifique point d'orgue inopinément tragique.