LE CHATEAU DES MORTS-VIVANTS
Titre Original: Il castello dei morti vivi
Réalisateur: Luciano Ricci et Lorenzo Sabatini.
Année: 1964.
Origine: Italie/France.
Durée: 1h31.
Distribution: Christopher Lee, Donald Sutherland, Gaia Germani, Philippe Leroy, Jacques Slanislawski, Mirko Valentin, Antonio de Martino, Luigi Bonos, Luciano Pigozzi, Ennio Antonelli.
FILMOGRAPHIE: Luciano Ricci est un réalisateur et scénariste italien né le 16 Novembre 1928, mort le 22 Juin 1973.
1962: Solo contro Roma
1962: Giuseppe venduto dai fratelli
1964: Senza sole nè luna
1964: Le chateau des morts-vivants
Lorenzo Sabatini est un réalisateur et scénariste italien.
1964: Le Chateau des morts-vivants
1969: Juliette de Sade
1970: Echec à la maffia.
Totalement inédit en France, Le Chateau des Morts-Vivants est un petit fim d'épouvante concocté par un trio de modestes réalisateurs, d'après un scénario de Michael Reeves (non crédité au poste d'assistant réalisateur).
Il se révèle paradoxale que cette production franco-italienne, particulièrement influencée par l'horreur gothique chère à Mario Bava (Le Masque du démon et sa sublime photo désaturée était sorti 4 ans auparavant), soit resté invisible dans nos contrées en salles mais aussi en vidéo. D'autant plus qu'en tête d'affiche se bousculent la valeur sûre Christopher Lee, le français Philippe Leroy et Donald Sutherland dans un triple rôle subsidiaire.
Au 19è siècle, une troupe d'animateurs ambulants se voient l'opportunité d'être invités par le comte Drago dans le refuge vétuste de son château reculé. Malgré la mise en garde d'une vieille sorcière sur le chemin du trajet, nos héros vont faire la rencontre d'un personnage passionné par la taxidermie. Accompagné de son serviteur Sandro, cet aristocrate complote secrètement dans une pièce cachée une macabre exposition d'êtres de chair et de sang rendus monolithiques.
ATTENTION SPOILER !!!! Débutant sa trame par un amusant prologue sarcastique en trompe l'oeil assénant avec succès son coup de trafalgar au spectateur interloqué FIN DU SPOILER, cette oeuvre bisseuse au charme vintage attise immédiatement la sympathie parmi ces personnages attachants de forains déambulants dans les ruelles des citadins champêtres pour suggérer de drôles de spectacles accès sur l'ironie macabre des mises à mort du 19è siècle.
Avec l'entremise d'une superbe photographie en noir et blanc et de décors gothiques soigneusement étalés, la narration classiquement établie nous entraîne dans un macabre refuge classieux d'un manoir antique abritant un florilège d'animaux embaumés mais aussi des cadavres rigides restés figés pour l'éternité. Une idée incongrue préservant son pouvoir de fascination, réexploitée ici avec sobriété d'une variation sur l'investigation des mannequins de cire, célébrée neuf ans au préalable par un certain Vincent Price dans l'Homme au masque de cire.
C'est l'efficacité du récit frugalement structuré par les disparitions inquiétantes de chaque personnage piégé, perdu dans ce dédale funéraire et régit par l'imposante présence du personnage perfide du comte Drago qui captivent le spectateur entraîné dans les couloirs de son royaume funeste. A ce titre, le final somptueusement baroque dévoilant enfin les travaux finaux de ses horribles méfaits dans la réserve d'une chambre secrète révèle sa plus belle séquence de poésie corporelle, laissant planer dans l'atmosphère un silence étrangement surnaturelle !
Avec classe, magnétisme glaçant et autorité hautaine, Christopher Lee réussit une fois de plus à camper un personnage lugubre dans ses exactions orgueilleuses, proprement azimuté pour sa quête obsessionnelle d'embaumer des êtres humains afin de préserver leur jeunesse inaltérable par le biais d'un procédé technique révolutionnaire.
Le valet du comte incarné par Mirko Valentin ne manque pas non plus de charisme mortifaire dans sa carrure décharnée d'esclave inculte inscrit dans la laideur physique, maladivement fasciné par les expériences morbides de son maître excentrique pour perpétrer machinalement des crimes gratuits tolérés en sa faveur.
D'autres personnages secondaires comme celui de la sorcière fétide (superbement campée par Donald Sutherland interprétant 3 rôles à la fois!), du nain glorieux, Nick (Antonio De Martino), Eric, le leader ambulant (Philippe Leroy) ou de la ravissante Laura (Gaia Germani) assument une interprétation harmonieusement convaincante, permettant d'accentuer de façon sous-jacente l'aura inquiétante des faits relatés.
Soigneusement réalisé avec savoir-faire esthétique, Le chateau des Morts-vivants est une formidable (nouvelle) découverte du gothique à l'italienne. Un film Bis agréablement suranné, parfois violent (en se resituant dans le contexte de l'époque), exacerbé par ces décors baroques rendus insolites comme ses immenses statues de pierre animalières disposées dans les jardins du château. L'efficacité continuelle du récit captivant, la beauté fulgurante de certaines images mises en exergues dans une atmosphère macabre prégnante et l'interprétation générale de l'ensemble contenteront largement les amoureux d'oeuvre transalpine à la beauté opaque et gothique.
Dispo chez ARTUS FILMS en dvd zone 2, vostf.